L’ÉTABLI

L’AUTEUR

Robert Linhart, né en 1943, est un sociologue et écrivain français. Ancien élève du lycée Louis-le Grand, de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, Docteur d’État en sociologie. Il est maintenant à la retraite, ancien maître de conférences au département de philosophie de l’Université de Paris VIII.

Ancien adhérent de l’Union des étudiants communistes (1964), il y anime le cercle des «Ulmards», marqué par la figure tutélaire de Louis Althusser. Au premier trimestre de l’année scolaire 1964-1965, une revue voit le jour, Les Cahiers marxistes-léninistes, dont le premier numéro – ronéotypé – sort avant Noël 1964.

Prochinois et très critique à l’égard du « révisionnisme » du PCF, il est exclu de l’UEC et fonde en décembre 1966 l’Union des jeunesses communistes marxistes-léninistes qui se scinde pendant l’été 68. Robert Linhart rejoint la Gauche prolétarienne, fondée à la fin de l’année par Benny Lévy.

Dans le cadre du mouvement des « établis », il entre alors comme ouvrier spécialisé dans l’usine Citroën de la porte de Choisy à Paris, et tire de cette expérience son ouvrage le plus célèbre, L’Établi, roman sociologique paru en 1978 aux Éditions de Minuit.

En 1979, il accompagne au Brésil Miguel Arraes (ancien gouverneur de l’État du Pernambouc, renversé par le coup d’État d’avril 1964), lors de son retour dans son pays natal à la faveur d’une amnistie politique. Le sucre et la faim est l’ouvrage d’enquête qu’il tire de son observation des conditions de vie des travailleurs agricoles brésiliens dans les plantations de canne à sucre où se recompose lentement un mouvement social réprimé par la dictature militaire.

LE TEXTE

L’Établi, ce titre désigne d’abord les quelques centaines de militants intellectuels qui, à partir de 1967, s’embauchaient, « s’établissaient » dans les usines ou les docks.
Celui qui parle ici a passé une année, comme O.S.2, dans l’usine Citroën de la porte de Choisy. Il raconte la chaîne, les méthodes de surveillance et de répression, il raconte aussi la résistance et la grève. Il raconte ce que c’est, pour un Français ou un immigré, d’être ouvrier dans une grande entreprise parisienne.
Mais L’Établi, c’est aussi la table de travail bricolée où un vieil ouvrier retouche les portières irrégulières ou bosselées avant qu’elles passent au montage. Ce double sens reflète le thème du livre, le rapport que les hommes entretiennent entre eux par l’intermédiaire des objets : ce que Marx appelait les « rapports de production ».

LE SPECTACLE

L’Établi est une épopée. Des mois intenses d’immersion. D’autres mois pour digérer, et écrire. Puis le silence, des années durant. Se souvenir du bruit, même en dormant. Les gestes répétés, les paroles d’ouvriers, et la solitude, la saleté, le pognon et tout le reste.
Paris, ses banlieues toutes neuves, et l’avènement d’une société de loisirs. Après mai 68, que Robert Linhart a passé à l’hôpital, les pavés sont retombés et il a fallu retranscrire, réfléchir, proposer cette autre société. Il a fallu rapprocher les générations, les cultures. Et le « vivre ensemble » s’est construit sur les ruines de mai 68.
De l’Université Paris-Vincennes – dont la fille de Robert Linhart, Virginie, a tiré un documentaire essentiel – à l’émergence d’un nouveau cinéma, démocratisé, et de formes théâtrales innovantes (les débuts de la Cartoucherie, de la décentralisation, la naissance des Maisons de la Culture, comme celle d’Amiens, inaugurée par André Malraux), le monde ouvrier et ses enfants accèdent peu à peu à une instruction alternative, et trouvent dans les fanzines d’humour ou autres cahiers étudiants (comme celui que fonde Robert Linhart à Ulm) comme un prolongement énervé des pensées à chaud, de la parole de la rue. Pas de récupération. Une écriture radicale.
Des vraies manifs. Dans le creuset d’émotions que suscite mai 68 et la décennie qui va suivre, il y a aussi beaucoup d’espoirs, dont certains sont déçus aujourd’hui.

Robert Linhart est un mystère. Un écrivain qui a vécu de l’intérieur et retranscrit cette période et l’engagement singulier des « établis ». Son récit, qui lorgne aussi vers l’essai économique et sociologique, est une photographie toujours juste des luttes ouvrières, et pose un regard jamais égalé sur la dualité des sentiments dits de « classes ». C’est le livre ultime, qui rassemble autant qu’il divise, et que même son propre auteur rechigne à analyser. C’est un bouquin sur la vraie vie des vrais gens, ceux de la grande couronne autour de Paris : les immigrés, noirs, arabes, portugais, polonais, qui cohabitent avec des titis parigots, et qui parlent de leur pays, et du nôtre, de leur époque, comme de la nôtre.
Quarante ans et des poussières après les choses ont changé. Il nous appartient de rendre compte d’une époque passée, révolue, hésitante, dans une époque résignée, plombée par des années d’expérience du capitalisme.
 Sur scène, il y a ce narrateur.

Six ou sept acteurs, pour l’aider à (se) jouer (de) tous les autres : les ouvriers, les petits patrons, la société. Quelques archives et beaucoup de matière sonore, autour de la musique de Toskano et Vadim Vernay, jouée live. Comme un bruit de fond, persistant, qui empêche la concentration, qui mine le recul nécessaire pour ne pas devenir fou, usé, obsolète. A travers des projections de photos, de documents d’époque, de vidéos subjectives, nous abordons L’Établi comme un terrain à explorer, avec le souci constant de ne pas nous positionner avec ce recul arrangeant, aujourd’hui vieux de quarante ans, qui pourrait dogmatiser le propos. Respecter le rythme de l’époque, propre au sociologue dissimulé. Il faut vivre le spectacle comme dix mois de questionnements et d’étonnements, jour après jour, comme un tunnel d’expériences humaines, avec les machines, avec les horaires, le rendement et la cadence.La musique nous aide à boucler ce périple en terrain inconnu, une pulsation de Spoutnik, industrielle, persistante et familière.

Lien vers DOSSIER DU SPECTACLE / REVUE DE PRESSE

L'ETABLI / 4 vidéos du SPECTACLE INTEGRAL

Compagnie du Berger / création 2018

 

L’ÉTABLI

d’après Robert Linhart

 

Adaptation Marie Laure Boggio, Olivier Mellor

Avec le concours de Robert Linhart

Mise en scène Olivier Mellor

 

Avec Emmanuel Bordier, Majid Chikh-Miloud / Marhane Ben Haj Khalifa / Hakim Djaziri, François Decayeux, Hugues Delamarlière, Vincent Do Cruzeiro, Romain Dubuis, Éric Hémon †, Séverin « Toskano » Jeanniard, Olivier Mellor, Rémi Pous, Stephen Szekely, Vadim Vernay 
et la voix de Robert Linhart

Musiciens, musique originale Romain Dubuis (piano, claviers), Séverin « Toskano » Jeanniard (direction musicale, basse), Olivier Mellor (kaossilator, guitare), Vadim Vernay (direction musicale, machines)

 

Scénographie, machineries Olivier Mellor, François Decayeux, Séverin Jeanniard

avec le concours du Collectif La Courte Échelle

Son Séverin Jeanniard, Benoit Moreau, Vadim Vernay

Régie son Benoit Moreau

Lumière, régie lumière Olivier Mellor

Vidéo Mickaël Titrent, Ludo Leleu

Régie vidéo Mickaël Titrent

Photos Ludo Leleu

Graphisme chadebec, Philippe Leroy

Costumes Marie Laure Boggio, Caroline Corme

Attachée de presse Francesca Magni

 

Production Cie du Berger, Chapelle-Théâtre – Amiens, Centre culturel Jacques Tati – Amiens

Coréalisation Théâtre de l’Épée de Bois – Cartoucherie -Paris.

Avec le soutien de l’association L’Ilot, de la Chapelle-Théâtre – Amiens, d’Amiens-Métropole, du Conseil départemental de la Somme, du Conseil régional des Hauts de France, de la DRAC Hauts de France, de la SPEDIDAM et de PICTANOVO

 

 


Spectacle tous publics à partir de 10 ans,  joué 88 fois au Centre culturel Jacques Tati // Amiens (80), au Théâtre de l’Epée de Bois / Cartoucherie // Paris, à Présence Pasteur // Festival Off d’Avignon 2018, à la Comédie de Picardie // Amiens (80), aux Anciennes Aciéries // Hirson (02), au Centre culturel Aragon-Triolet // Orly (94), au Centre culturel Marius Staquet – la Virgule // Mouscron (Belgique), au Théâtre du Beauvaisis – scène nationale // Beauvais (60), au Théâtre de la Verrière // Lille (59), à l’Espace culturel St André // Abbeville (80)…