BRITANNICUS

L’AUTEUR

Jean Racine est né à La Ferté-Milon (Aisne) le 21 décembre 1639. À l’âge de deux ans, il perdit sa mère et, bientôt après, son père. Resté orphelin, il fut élevé par sa grand’mère, Marie des Moulins. Or celle-ci avait deux sœurs et une fille religieuses à Port-Royal ; et peu de temps avant la naissance de Jean, la famille Racine avait donné asile à plusieurs jansénistes célèbres : Lancelot, Le Maître, Séricourt, chassés en 1638 de Port-Royal des Champs. Le petit Racine vécut donc, pendant sa première enfance, au milieu d’influences jansénistes. Et, quand il fut en âge de travailler, on l’envoya au collège de la ville de Beauvais, dirigé par des jansénistes ; puis, à seize ans, on le mit aux Petites-Écoles de Port-Royal. Là il fit d’excellentes humanités, il y apprit le grec (que l’on n’enseignait pas alors dans les collèges de l’Université ou des Jésuites) ; mais surtout il y reçut une profonde éducation religieuse.

Ses études terminées, après une année de philosophie au collège d’Harcourt, à Paris, Racine accepte une petite place auprès de son oncle Vitart, intendant du duc de Chevreuse. Mais il est de bonne heure tenté par la poésie, et en 1660, il publie une ode intitulée La Nymphe de la Seine, composée pour le mariage du Roi. En même temps, il se lie avec La Fontaine, et il s’attire les remontrances de Port-Royal. Pour l’arracher au monde des lettres et du théâtre, sa famille l’envoie à Uzès (dans le Gard), où l’un de ses oncles, le chanoine Scouin, lui promettait un bénéfice ecclésiastique. Il reste dans le Midi à peu près un an, étudiant fort peu la théologie, et préparant des poèmes et des tragédies. Quand il revient à Paris, en 1663, il fait paraître une Ode sur la convalescence du Roi, et reçoit une gratification de 600 livres, dont il remercie Louis XIV par une nouvelle pièce : La Renommée aux Muses.

En 1664, la troupe de Molière, au Palais-Royal, joue la première tragédie de Racine : La Thébaïde ou les Frères ennemis. L’année suivante, le même théâtre donne Alexandre ; mais Racine, mécontent des acteurs tragiques de Molière, porte sa pièce à l’Hôtel de Bourgogne qui la joue concurremment avec celle du Palais-Royal. Dès ce jour, Molière et Racine sont brouillés. En même temps, Racine, piqué au vif par une phrase de Nicole sur les poètes comparés à des « empoisonneurs publics », lance contre Port-Royal une petite lettre qui est un chef-d’œuvre d’esprit et un acte de noire ingratitude; il allait en publier une seconde, quand Boileau l’arrêta.

De 1667 à 1674, Racine donne, toujours avec succès, mais non sans luttes ni polémiques : Andromaque (1667), les Plaideurs (1668), Britannicus (1669), Bérénice (1670), Bajazet (1672), Mithridate (1673), Iphigénie (1674). En 1673, il était entré à l’Académie française. Trois années s’écoulent entre Iphigénie et Phèdre jouée au mois de janvier 1677; on sait qu’une violente cabale fut montée contre la Phèdre de Racine par la duchesse de Nevers et la princesse de Bouillon qui voulaient faire triompher la Phèdre de Pradon. D’ailleurs, la pièce de Racine se releva après la troisième représentation, et il est inexact de parler ici d’une chute.

Mais Racine, précisément cette même année, se réconcilie avec ses anciens maîtres de Port-Royal, en particulier avec le grand Arnauld. Alors, il renonce au théâtre, se marie, devient historiographe du Roi, fréquente la cour et élève une nombreuse famille. En 1689, il consent à écrire, sur la prière de Mme de Maintenon, un ouvrage propre à être récité et chanté, pour les jeunes filles de Saint-Cyr : c’est Esther, dont les représentations eurent un immense succès ; et, en 1691, il donne, à la même intention, Athalie qui, jouée sans costumes dans la chambre du Roi, passa d’abord pour inférieure à Esther.

Les dernières années de Racine furent attristées, dit-on, par une disgrâce auprès du Roi, on ne sait pour quelle cause. Mais cette disgrâce, du moins, fut courte, et paraît n’avoir été due qu’aux attaches de Racine avec Port-Royal qui devenait de plus en plus suspect à Louis XIV. Il mourut le 21 avril 1699, laissant sept enfants, dont deux fils : Jean-Baptiste à qui il a adressé des lettres charmantes et qui mourut en 1747, et Louis, auteur des poèmes de La Grâce et de La Religion.

LE SPECTACLE

Monter Racine aujourd’hui, c’est s’attaquer à la fois aux codes du théâtre du XVIIème siècle, puissants et omniprésents, mais c’est aussi (et surtout) s’attaquer à la « réputation » de son auteur, malmenée par de vieux souvenirs de sorties scolaires suivies d’interminables dissertations et autres cours magistraux. Monter Racine aujourd’hui, c’est aussi s’exposer aux sempiternelles questions sur l’actualité du texte, sur la difficulté d’apprendre et jouer les alexandrins, ou sur l’apparente désuétude de l’exercice.

Monter Racine aujourd’hui, oui, c’est un peu désuet, un peu difficile, peut-être un peu vain, et sûrement un peu fou. Et pourtant, il nous faut dépasser les clichés, et comprendre que notamment les plus jeunes spectateurs (et nous en aurons), Racine jouit encore d’une certaine forme de page blanche, et que sa réputation, ce sont nous, les adultes et les gens de théâtre, qui l’avons faite. Racine n’a jamais été qu’une superstar en son temps. Aujourd’hui, les jeunes spectateurs ont d’autres héros, qui n’ont absolument rien à voir avec Jean Racine…

Le choix des actrices et acteurs familiers de la compagnie, tous aguerris aux alexandrins, et qui se connaissent bien, viendra renforcer un sentiment de saga familiale. Pour jouer Racine, il faut d’abord faire admettre qu’il faut connaître l’auteur et son époque, son éducation religieuse et leurs enjeux. Jouer la Rome antique, devant le Roi, c’est jouer le Roi sans le heurter ni le contraindre. Jouer Racine aujourd’hui, c’est faire comprendre ce que la Rome antique peut nous apprendre sur nos sociétés actuelles : mêmes intrigues, mêmes trahisons, sous cette cloche de verre muséale.

Le système tri-frontal devient un laboratoire où le public, encerclant, est là pour observer les grands de ce monde d’en haut, de chaque côté, et ces différents points de vue viendront briser l’intimité des scènes.

Nous utiliserons la vidéo sur ce spectacle, comme nous l’avions déjà fait sur L’ÉTABLI, avec toujours Mickaël Titrent. Sur Britannicus, la vidéo pourra figurer le décor, des ambiances, des couleurs, mais donnera aussi des indications utiles, des rappels de généalogie, de temps, de lieux. Elle pourra aussi ponctuer l’action d’images illustratrices ou décalées, et même accompagner le sentiment des personnages, l’isoler ou le mettre en valeur.

Trois cent cinquante ans nous séparent de la première représentation de Britannicus, à la cour du Roi Louis XIV, et plus de vingt siècles et des poussières nous éloignent de Néron et de ses affaires familiales, protagonistes tirés d’une Histoire vraie… Aujourd’hui, un jeune empereur ne gouvernerait pas sans les nécessaires débats au Parlement et au Sénat. Aujourd’hui, aucun intérêt privé et aucune décision politique ne pourraient se substituer aux alarmes scientifiques, aux injonctions intellectuelles et aux déferlantes expressions du peuple inquiet de voir s’étioler son service public… Aujourd’hui, l’écriture muséale de Racine n’a aucune chance de rivaliser avec le pragmatique mode d’emploi de nos sociétés modernes. Aujourd’hui surtout, Jupiter ne sacrifie plus la jeunesse comme à l’époque de l’Empire romain…

En musique et ensemble, comme d’habitude, ce spectacle est un voyage dans le temps. Notre regard et notre réaction à cette situation, et les corrélations entre l’Empire romain, Racine, et nous. Notre 37ème spectacle.

 

Lien vers DOSSIER DU SPECTACLE / REVUE DE PRESSE

Télécharger le DOSSIER PÉDAGOGIQUE (collèges, lycées)

Compagnie du Berger / création 2022

 

BRITANNICUS

une tragédie de Jean Racine

 

Mise en scène  Olivier Mellor

 

texte intégral / durée: 2h25 (avec entracte)

 

Avec Marie Laure Boggio, Caroline Corme, François Decayeux, Hugues Delamarlière, Marie-Laure Desbordes, Vincent Do Cruzeiro, Rémi Pous et Stephen Szekely

 

Musique originale Séverin Toskano Jeanniard

Musiciens Thomas Carpentier (violon), Séverin Toskano Jeanniard (contrebasse), Adrien Noble (violoncelle), Louis Noble (sax ténor, guitare)

feat. Romain Dubuis (piano)

 

Scénographie, machineries François Decayeux, Séverin Jeanniard, Olivier Mellor

avec le concours du Collectif La Courte Échelle

Son Séverin Toskano Jeanniard

Régie son Benoit Moreau, Ben Moritz

Lumière, régie lumière Olivier Mellor

Vidéo, régie vidéo Mickaël Titrent

Costumes Bertrand Sachy

avec le concours des élèves de première année de BTS Métiers de la Mode – Vêtements / Lycée Édouard Branly, et de leur professeure Cécile Estienne

Maquillages Karine Prodon

Photos Ludo Leleu

Visuel affiche Jean-Baptiste Perrot

Graphisme Jef Benech’

Attachée de presse Francesca Magni

Cantine TeamKalorik

 

Production Cie du Berger, Centre culturel Jacques Tati // Amiens

Coproduction Comédie de Picardie – Scène conventionnée d’intérêt national pour le développement de la création théâtrale en région // Amiens

Coréalisation Théâtre de l’Épée de Bois – Cartoucherie // Paris

Avec le soutien d’Amiens-Métropole, du Conseil départemental de la Somme, du Conseil régional des Hauts de France et de l’ADAMI

PROCHAINES DATES


5, 6 février 2024 / CENTRE CULTUREL JACQUES TATI / AMIENS (80)

17 février 2024 / L’ENTREPÔT DES SELS / SAINT-VALERY SUR SOMME (80)

14 mars 2024 / THÉÂTRE MUNICIPAL / ABBEVILLE (80)

Spectacle tous publics à partir de 14 ans, déjà joué 41 fois au Centre culturel Jacques Tati // Amiens (80), au Théâtre de l’Epée de Bois / Cartoucherie // Paris, à la Comédie de Picardie // Amiens (80), à l’Entrepôt des Sels // Saint-Valéry sur Somme (80), au Théâtre municipal // Abbeville (80)…